« Peindre n’est pas dépeindre
Comme écrire n’est pas décrire »
G. Braque
Face à une œuvre de Virginie Remillieux, on essaie de voir à travers, au-delà, de passer sous les couches de peintures, les coulures, les lignes, les traces de fusain, la trame pour tenter de saisir l’invisible corps qui est en cours de disparition dans la matière et dans le néant.
Face à une linogravure de Virginie, le regard se trouve confronté à une densité de lignes évoquant la verticalité de branches ou barreaux l’empêchant de pénétrer à l’intérieur. Le choix de cette technique et de l’imprimer sur une matière chaude et laineuse, trouble en augmentant la sensation de douceur masquée et impalpable.
Face aux peintures de Virginie, où la dilution de la matière et de la couleur impose à nos yeux un balayage de haut vers le bas, n’est-ce pas pour mieux signifier et accompagner la fragilité de notre vie, sa chute inéluctable ?
Ses corps androgynes dans leurs fragiles nudités basculent hors de la toile pour disparaitre nous entrainant hors cadre.
Les références à Bacon, Baselitz et Bill Viola sont sous-jacentes, hommage discret d’une artiste qui a dans l’œil, gravée sur sa rétine, ces images fortes de l’art contemporain.
La dissolution de la peinture, des traits de fusain viennent encore une fois brouiller notre vision, comme une pluie qui ruisselle sur une vitre et nous empêchent de discerner les formes.
Ce trouble flouté de notre vision est une manière pour l’artiste de mettre de la distance entre le représenté et notre perception, une manière de suggérer l’empreinte, la trace, le halo fantomatique de quelque chose qui a été là et qui déjà disparait, se liquéfie, s’évapore à notre approche….Métaphore de la quête du peintre, qui voit la perfection s’éloigner, au fur et à mesure, de ses tentatives de rapprochement ; comme si toutes ses œuvres n’étaient que tentatives, études qui en appellent d’autres, en séries, en variations, tel un musicien, pour toucher au plus près au thème central.
Face à la série des Marilyn de Virginie, le trouble est encore plus fort. Pourquoi cette série de photos de Bert Stern de 1962, les dernières de la star, un mois avant sa disparition, ont fasciné Virginie et pourquoi elles nous hypnotisent ?
Peut-être parce que cette icône fantasme absolue de la femme libre et provocante y dévoile enfin sa fragilité et sa disparition annoncée. Sa peau si blanche, capable de si bien capter la lumière, pour les nombreux photographes qui l’ont sacralisé, devient juste une pâleur évanescente et ne laisse apparaitre que la toile blanche. Virginie ne laisse visible que le regard intense et vide, déjà ailleurs, et ces lèvres pulpeuses, ultras féminines, dernier vestige de l’apparat hollywoodien, survivantes à cet effacement programmé.
Ces sept variations, comme sept jours de la vie d’une femme, avec cette dislocation de plus en plus palpable, comme si le temps s’accélérait et rendait inévitable ce passage vers un ailleurs, tel un Roman Monroe ou plutôt une Marylin Opalka qui marque le temps, et entraine vers l’oubli l’ensemble des clichés retouchées et fardées d’une femme sacrifiée.
La fascination que l’on ressent, devant ces inexorables effacements, rejoint peut être aussi de façon plus ludique et légère, des souvenirs d’enfance. Qui n’a pas, en souvenir de parties de cache-cache où les amis doivent disparaitre, tricher en regardant malgré tout entre ses doigts des fragments de pistes ; ou encore, qui n’a pas, un soir d’été, cligner des yeux en scrutant la lumière à travers la frondaison des arbres ?
Virginie aimait jouer dans une forêt de bambous et donc apercevoir le réel au travers d’une trame, d’un filtre, d’une grille qui vient masquer en partie le réel et le rendre abstrait.
Et si, face à toutes ces œuvres, nous n'étions, après tout, que renvoyé à nos propre souvenirs, à tenter de voir au-delà des branches, des stores, des rideaux, un monde s’évaporant comme ses êtres pour les garder présents en nous, blottis au fond de notre mémoire rétinienne.
Une façon douce d’accepter l’inéluctable fin et, grâce au travail de l’artiste, d’atteindre une fragile immortalité.
Yvan Mathevet
9 octobre 2020
Série Faces 2021
Huile sur toile
40cmx 4
Huile et fusains sur toile
Diptyque 150x50x2
Huile et fusain sur toile
150X150 cm
Lost Icon
Un texte de Pierre Rochigneux
Exposition septembre 2020
La scène est rapidement peuplée, les voix sont mesurées, attentives. Pourtant au-dessus se forme un brouhaha qui peut appartenir au passé du lieu, voix compactées, prisonnières, naissance de fantômes, ricochets. Le désordre est orchestré, tout se met en place. Nous regardons, nous interrogeons, nous prenons place, nous éteignons nos connexions.
elle - Je prendrai soin de me cacher dans les entrelacs.
lui - Vos yeux n'y verront rien.
elle - Mais pas éteints, dans les entrelacs foisonnants. Un désert ne conviendrait pas.
lui - On vous cherchera.
elle - On ne trouve pas ce qui est inconnu, on ne me formulera pas, mon invisibilité est cette chance de ne pas être nommée.
À cet instant d'évocation, nous aurons l'envie de reconnaître ce qui se cache derrière l'évidence. Ça s'appelle l'apocalypse, le mensonge, le plaisir, le fantasme, ça s'appelle l'imagination limitée à ce rideau de scène, le spectacle ne commence pas, la parole est retenue, en équilibre et l'image est sourde. Alors ? Secouer l'arbre, en tomberait bien quelque fruit. Secouer le nuage, en chuteraient bien quelque goutte, un flocon, un pois de glace. Brouillon précis, une rivière se presse d'aller plus loin, le vent ne s'attarde ni dans un instant ni dans un endroit, par leur parcours appliqué dans un désordre apparent ; la fluidité est ou n'est pas.
lui - Secouez, vous dis-je !
Elle secoue l'image, mains au corps elle secoue, sa tête dodeline à cet exercice et dit non et dit oui. Respirations entendues.
lui - Chut, me dis-je, ne la prononce pas, fiche-lui la paix de sa disparition.
"Viens",
me raconte-t-elle enfin.
Peureux de mes désirs, je me retourne. Il est possible de s'échapper encore, après les récits et la description, il n'y a plus rien, je me retourne, il n'y a rien, les regards. Ma mémoire fait faux bond et mes doigts ne tiennent rien, le laisser-aller peut s'installer, je me retourne pour à nouveau être en face. Le rideau m'a attendu. Les écrans veillent. Les images s'offrent. "Viens".
lui - Ne soyez pas impatiente, voyez, tout s'use avec enthousiasme et la nostalgie n'est pas de mise.
elle - Trop vite. Je n'arrive pas à fixer, je ne sais pas en faire un souvenir qui tienne, qui me forme, qui me ressemblerait quand j'en aurai besoin.
lui - Vous voulez ne pas disparaître.
elle - J'aimerais me retrouver.
lui - Dans ce qui coule, dans ce qui est nécessairement futile. Je ferais un mauvais jeu de mots en disant que vous aspirez à la mer.
elle - Je me retrouve dans toutes les superpositions, le sol d'une grotte calcaire, la masse d'un iceberg, l'écorce finale comprenant les veines du tronc. Les troncs d'une forêt qui se déplace.
lui - Si je vous découpe ou si je vous carotte, je lis votre âge.
elle - Et la qualité de ses instants, plus ou moins denses. C'est impudique.
lui - Oui. Si vous vous tournez comme je l'ai fait, vous vous perdez aussi ?
elle - Je chute comme une plume de plomb.
lui - Dans toute chute, la vitesse se stabilise. La pluie, les feuilles, les anges. La qualité du sol importera.
La qualité de réception. Les silences ponctuent les questions, parfois, les phrases disparaissent, avalées par un accident de son, il faut alors chercher les visages, deviner les intentions. Ce qui n'est pas prononcé est pourtant écrit dans le texte et nous focalisons notre attention sur les corps en mouvement. Les ondulations n'ont pas cessé, parfois revient à la surface une trace. Est-ce une respiration vivante, l'action d'un pourrissement ? Le remous d'un mystère qui prend l'air puis revient dans la matière.
Linogravure sur feutre 150x150cm
Huile, linogravure et fusains sur papier
40X60 cm
Huile et linogravure sur toile
100x150cm
Huile et linogravure sur toile
100x150 cm
Triptyque
Pigments, huile, linogravure sur toile
150 x 50 cm x3
Pigments, huile, fusain, linogravure sur papier
50x65 cm x3
Linogravure et pigments à l'huile sur toile
50 x 65 cm
Linogravure et pigments à l'huile sur papier
50 x 65 cm
Linogravure et pigments à l'huile sur papier
50 x 65 cm
Linogravure et pigments à l'huile sur papier
50 x 65 cm
Linogravure et pigments sur papier
50 X 65 cm
Linogravure et pigments sur papier
50 x 65 cm
Huile, pigments et fusains sur toile
120 x 120 cm
Huile, pigments, linogravure sur toile
97 x 147 cm
Pigments, encre et huile sur toile
120 x 120 cm
Pigments, encres et huile sur toile
120 x 120 cm
Huile, pigments, pastels et craft sur toile
100 x 100 cm
Pigments et huile sur toile
100 x 150 cm
Huile, pigment, craft et linogravure sur toile
65 x 80 cm
Huile, pigments et craft sur toile
100 x 70 cm
Huile, pigments et Craft sur toile
100 x 70 cm
Pigments et huile sur toile
100 x 70 cm
Huile et pigments sur toile
100 x 70 cm
Triptyque
technique mixte
100 x 100 x 3
Huile, pigments et pastels sur toile
100 x 100 cm
Huile et pigments sur toile
100 x 100 cm
Huile et pigments sur toile
120 x 120 cm
Huile, encre et pigments sur toile
100 x 100 cm
Pigments et acrylique sur toile
100 x 150 cm
Acrylique et pigments sur toile
100 x 150 cm
acrylique et pigments sur toile
50 x 150 cm